Confiture de figues de Barbarie
Une confiture qui ne manque pas de piquants...
Tous les jeudi et samedi matin, il y a dans notre charmante bourgade le marché. Nous n’y allons pas souvent mais la semaine dernière, bien décidés à aller marcher un peu au marché (logique non ?), nous avons pris notre beau panier et en avant ! Je trouve que le marché est un endroit fascinant. Outre les fruits et légumes, ce que j’aime, c’est regarder les gens. Il y en a trois sortes.
Tout d’abord, les gens du cru (et pas du cul, même si certains dégagent des odeurs qui s’en approchent…). Ils se connaissant tous (ou presque) et passent en fin de compte plus de temps à discuter qu’à acheter des produits maraîchers. Il est de toute manière probable qu’ils aient un jardin chez eux et le marché est donc pour eux un endroit de rencontre, tout comme la sortie de l’église, mais en moins pénible car ils n’ont pas à attendre une heure et demie que le curé ait fini de psalmodier…
Ensuite, il y a les touristes et assimilés. J’entends par “assimilés” les nouveaux habitants de la commune qui ne se sont pas encore intégrés et acclimatés. Ils sont assez faciles à reconnaître, ce sont ceux qui s’arrêtent devant chaque étal en s’extasiant, ô, une patate ! Ils ont également une tenue vestimentaire remarquable. Pour eux, marché de province signifie foire aux bestiaux boueuse. Ils portent donc des bottes en caoutchouc de grande marque, même par beau temps… C’est vrai, j’exagère un peu (quoique…).
Et enfin, il y a les gens qui habitent ici depuis déjà quelques temps et qui sont entre les touristes et les gens du cru. Ils ne s’extasient plus devant les étals mais ne s’arrêtent pas non plus pour discuter au milieu des allées. Ils achètent leurs fruits et légumes tout en regardant du coin de l’œil les touristes avec un sourire moqueur et tendent l’oreille pour écouter les discutions au cas où l’on parlerait de quelqu’un qu’ils connaissent. Bref, je fais partie de cette catégorie et c’est pour moi un vrai bonheur que d’aller faire le marché. D’autant plus que l’on y trouve parfois des choses surprenantes, comme ces barquettes de figues de Barbarie.
Bien sûr, attiré par la curiosité, j’en ai acheté une après que le vendeur nous en ait fait goûter un bout en nous montrant comment enlever la peau. Il nous a bien prévenu que c’était le fruit d’un cactus et qu’il y avait donc des petites épines un peu partout sur la figue. Bien entendu, lui les prenait à pleines mains sans se plaindre le moins du monde…
De retour dans ma cuisine, j’entreprends donc d’en peler quelques-unes pour le dessert. Et rassuré par la démonstration du vendeur, à mon tour j’en prends une à pleine main et... la relâche de suite !!! Grand mal m’a pris de tenter l’expérience, j’ai la main couverte d’épines invisibles mais très douloureuses. Je me mets à me gratter comme un forcené mais rien n’y fait. Point de figues au dessert ce jour là, je peux vous l’assurer !
Le lendemain, la douleur s’étant atténuée, je chausse deux gants en cuir épais. À nous deux, figue du diable ! Je commence par bien les frotter et je les fais tremper dans un bac d’eau fraîche. Des milliers de petits poils flottent à la surface. Je les préfère là que dans mes mains ! Ensuite seulement, je coupe les deux extrémités et j’entaille profondément la figue sur sa longueur. À l’aide de mon couteau, j’attrape la peau et la première couche de chair qui est amère et je tire. Ça vient tout seul. Une fois cela fait, je coupe le cœur en quartiers dans un bol et je les réserve nature pour le dessert.
Mais c’est plein de pépins et nous sommes quelque peu déçus par le goût, certes bon mais pas aussi fort que nous l’avions espéré. Qu’à cela ne tienne, j’en ferai de la confiture ! Et l’après-midi même, je pèle le reste de mes figues et je coupe leurs cœurs en morceaux grossiers que je mets dans un tamis à grosses mailles. Une fois cela fait, je commence à écraser les morceaux dans mes mains afin de délier la chair des pépins. Une fois cela fait, à l’aide d’une cuiller en bois je frotte le tamis pour faire passer la chair à travers celui-ci. J’obtiens un jus orange foncé qui enchante vraiment les papilles.
J’ai, après pesée, 500g de jus et chair de fruit. Je mélange cette préparation avec 400g d’un mélange pour moitié de sucre cristallisé et de gelsuc (sucre additionné de pectine qui facilite la prise des gelées). Je réserve le tout filmé au frais pendant une nuit. Le lendemain, j’ajoute un jus de citron et je commence la cuisson à feu fort. Après 20 minutes à feu moyen, je fais un test sur une assiette préalablement placée au congélateur. La cuillère à café que j’y ai versé se tient (ma cuisinière aussi peut le confirmer après un léger débordement !), ma confiture est donc cuite et je mets en pots (en fait, j’aurais pu laisser pot au singulier car je n’en ai qu’un de rempli complètement…).
Après repos, j’ouvre le fond de pot que j’ai fait après avoir rempli mon pot plein et… Ô surprise !!! Ma confiture a des reflets verts fluo sur sa belle robe orangée… Ça ne manque pas de me rappeler cette pâte visqueuse (il me semble que ça s’appelait du slim…) qui était vendue avec les jouets Musclor. Mais je vous rassure, une fois cette originalité esthétique passée, cette confiture est vraiment excellente !