Crème de marrons de la Creuse
Hommage à un des fruits emblème de la Creuse.
Peut être avez-vous eu un jour l’occasion de croiser sur votre chemin des individus furetant truffe à l'air, cherchant désespérément derrière des pierres un objet mystérieux en pleine campagne ? Oui ? Alors il s’agissait sûrement de cisteurs. Qu’es aco ? me demanderez-vous. Et bien il s’agit d’une chasse au trésor géante sur l’ensemble du territoire français mais également à l’étranger. Il n’y a rien à gagner, juste le plaisir de chercher et trouver mais surtout découvrir une région. Tout cela grâce au site cistes.net.
Voilà le compte rendu d’une journée de chasse aux cistes qui vous donnera j’espère envie d’y participer aussi.
Le week-end arrive, nous avons eu la semaine pour nous creuser les méninges à trouver ce qu'il se cachait sous les différentes énigmes. Mais aujourd'hui c'est samedi, alors fini la recherche d'informations, on va cister !!!
Vérification du sac à dos :
Boussole : ok
Gourde d'eau : ok
Cartes : ok
Jumelles : ok
Poche plastique : ok
Boite avec objets de remplacement pour cistes : ok
Compilation des énigmes et stylos : ok
Piolet et crampons : ok
Kit de survie (couteau, allumettes, ficelle) : ok
Kit de camouflage : ok
Kit d'élimination des concurrents : ok
Nous voilà fin prêts ! On décolle, direction les énigmes Creuse 7, 4 et 5. Oui, nous ne faisons pas le circuit dans le bon ordre. En même temps, y a-t-il un bon ordre ? Qu'est ce que la normalité ? Qui suis-je ? Où vais-je ? Sers-je ? Euh…, oui, Gainsbourg...
Première de notre liste, la septième énigme des neuf Creuse. Nos sources étaient bonnes, les cornes ne nous ont pas trompés et la boite était bien à la place prévue. Aucun problème rencontré, nous continuons, galvanisés par cette première trouvaille. Direction l'énigme numéro 4.
Oui mais c'était sans compter sur notre frénésie qui nous a fait dépasser de beaucoup (trop) le lieu présumé de cette ciste. Qu'à cela ne tienne, nous sommes des fous, nous continuons ! Car déjà nous entendons le doux appel de la ciste numéro 5. Nous tendons l'oreille et nous suivons son chant mélodieux, ô cryptique sirène... Et là, un ravissement de l’œil nous fait un instant oublier notre quête. Que de beauté ainsi cachée !
Après ce moment d'intense émotion à la vue de ce paysage grandiose, nous nous sommes mis à chercher ces deux fameux ménechmes téléphoniques. Ce ne fut pas bien dur puisque il n'y en a pas sur ce site des milliers non plus. Le déplacement de quelques pierrailles nous dévoila la ciste, bien cachée et bien gardée car hébergeant quelques mollusques terrestres fort peu ragoûtants.
Passé les premières réticences à toucher ces doux habitants (oui, au sens propre comme au figuré, je confirme ), je me saisis de l’objet convoité et l’ouvre avidement. Oublié les beautés du panorama, ne comptait plus maintenant que les trésors que recelait cette petite boite. L’émotion de la découverte retombée, nous avons effectué les changements et ré-empaqueté la boite.
Je m’avance alors vers sa cache pour l’y reloger quand soudain, j’aperçois dans l’angle de mon œil une forme vague bouger. Intrigué, je me retourne et là, surprise, une des doyennes du hameau venait discuter avec nous. Stopper net dans mon élan, j’essai de donner le change en me figeant en une contemplation benoîte du panorama. La discussion, fort intéressante au demeurant, traîne tout de même en longueur à mon goût. La vieille dame nous indique alors une curiosité à voir un peu plus loin. « Ne prenez pas la première à gauche » nous dit-elle, « c’est une piste qui vous y mènera mais elle est peu carrossable. Prenez plutôt la deuxième à gauche après le village. Ensuite, vous n’aurez qu’à demander… »
Profitant de l’aubaine que nous offrait cette invitation à partir, nous prenons congé de cette dame qui nous annonce qu’elle va continuer sa balade. Mais alors, quid de la ciste que j’ai encore dans les mains ? Nous décidons de la kidnapper et de ne la re-déposer qu’au retour de notre excursion. Nous voilà donc partis : deuxième chemin sur la gauche puis nous suivons le panneau indiquant ce que nous allons voir. Arrive alors un croisement, et deux choix s’offrent à nous : tout droit ou à droite. Grand dilemme, quel choix faire. Le fil rouge ou le fil bleu ? Fromage ou dessert ? … Nous optons d’un commun accord pour partir tout droit. La route est bonne ce qui nous réconforte dans notre choix (oui, nous sommes les meilleurs, c’est normal que nous ayons bien choisi ! ), jusqu’à ce que le bitume laisse sa place à un chemin en terre cahoteux. Nous commençons à nous demander ce que devait être la piste dont la vieille dame nous avait parlé vu l’état de ce chemin. Et nous débouchons enfin sur un nouveau croisement, qui s’avère n’être en fait que le fameux premier croisement que nous ne devions pas prendre… (je veux pas dire mais même les meilleurs se trompent parfois ! Regardez les gars du PSG : ils jouent bien au foot alors qu’ils sont meilleurs au tricot… [ j'aime bien, je dis ça alors que j'y connais rien en foot... ] )
Persévérant, nous reprenons la route initiale, puis la deuxième à gauche, à nouveau à gauche (tiens, il y a comme un petit air de déjà vu…) et enfin, nous optons pour la route de droite !!! Après quelques kilomètres de plus, nous arrivons au fameux lieu dont la doyenne nous avait vanté tant de beauté. Et nous sommes fortement déçus ! Beaucoup de béton et malheureusement rien de plus à voir. Ça nous aura au moins permis d’attendre que la dame finisse sa balade et rentre chez elle. Nous rentrons par la piste (tiens, à nouveau un air de déjà vu…) et nous redescendons vers la cache cistique. Youpi ! Personne ! Nous sommes ravis de pouvoir relâcher enfin notre otage involontaire. Je me baisse pour la prendre dans mon sac, et…, la doyenne est en train de remonter le chemin quand je me relève, tout doucement, un pas après l’autre, sans aucune précipitation….
Dépités, nous la dépassons en faisant comme si de rien n’était et lui faisons un petit coucou en passant. Nous sommes bon pour un nouveau détour afin de revenir sur nos pas. Dix minutes passent et nous repassons pour la troisième fois devant cette fameuse mais inaccessible cache, espérant bien cette fois qu’elle soit déserte ! Mais c’est peine perdue ! La veille dame est cette fois accompagnée d’une foule de marmailles en furie et de leurs mamans, envahissants le lieu de cache. Malédictions, jamais nous ne pourrons donc remettre cette fichue ciste en place ?!? Nous dépassons le groupe et il se lit une certaine incompréhension dans les yeux de la vieille dame lorsqu’elle nous revoit passer devant elle pour la troisième fois… Nous nous arrêtons quelques mètres en contre bas et nous tendons l’oreille en guettant le départ de la petite troupe. Mais au bout de dix minutes, ils sont toujours en place et bien ancrés. De plus en plus dépités, nous allons nous retrancher de l’autre côté de la vallée afin de guetter leur départ à la jumelle !
Je vous épargne là la dégustation d’une bière périmée au bistrot du coin dans l’attente du départ des envahisseurs… Mais je vous rassure, tant de péripéties et d’abnégations nous ont tout de même permit de remettre la boite en place, seulement deux heures et demie après l’avoir trouver…
En route donc pour la dernière ciste de la journée, la Creuse 4 ! Emporté par la fougue de notre jeunesse (je me plais à le croire…), nous avions bel et bien manqué une intersection lors de notre premier passage à proximité. Le panneau directionnel est trouvé mais il y a foule dans les rues à cette heure-ci. Comment passer inaperçus ? Ma compagne décide de garer notre véhicule devant pour faire office de paravent, enfin, plutôt de brise vue. Et nous voilà à quatre pattes en train de chercher au pied de ce panneau. Nous y serions encore si l’un de nous (si ce n’est les deux en même temps) n’avait proposé d’aller faire un tour sur le chemin indiqué par ce panneau. Et grand bien nous en a pris car il s’est avéré que nous nous trompions de panneau ! Une fois la ciste découverte, les échanges effectués et la boite re-cachée, nous avons continué la balade. Ma compagne a rempli la poche plastique de châtaignes, sachet que j’ai du porter bien entendu (note pour moi même : la prochaine fois, oublier de mettre la poche en plastique dans le sac à dos ) et bien entendu, lors du passage du gué, il a bien fallu que je remplisse l’une de mes chaussures de trois litres d’eau de source (elle est si bonne, comme dirait Guy ).
Enfin, après toutes ses aventures, nous avons bien été content de pouvoir inscrire nos six échanges (2x3) sur cistes.net !!! Le pire étant que nous sommes prêts à recommencer dès demain
Mais que faire avec toutes ces châtaignes maintenant ? Ma compagne me glisse subrepticement l’idée d’une crème de marrons. Alors que moi je les aime passées au feu de bois puis mangées encore un peu chaudes même si on a les doigts noirs après, elle, elle n’en raffole pas. Par contre elle est friande de la crème de marrons. Pour me motiver, en sachant très bien que j’allais relever le défi, elle me dit que de toute manière je ne pourrais pas en faire une aussi bonne que celle du commerce. Et bien c’est ce que nous allons voir !
Devant les séries niaiseuses du dimanche soir que nous offre la télévision, je passe le temps en décortiquant la première peau des châtaignes. C’est assez facile à faire quoiqu’un peu long : une incision de la peau brune puis avec la pointe d’un couteau, on la retire doucement.
Une fois cela fait, je les fais cuire en sous-vêtements pendant deux heures dans de l’eau (/!\ non salée !) à petits frémissements. Et une fois froides, c’est reparti pour une séance de pelage, mais plus pénible celle là car la châtaigne maintenant s’effrite et la peau blanche est plus fine et a tendance à coller à la chaire. J’arrive quand même à bout du tas qui a fondu comme neige au soleil. De mon kilo de départ, je n’ai plus que 400 grammes maintenant.
À ce stade, je dois transformer en purée tous mes cerneaux. J’opte tout naturellement pour le presse purée. Mais sans succès car les châtaignes se compactent et mon presse purée ne tient pas le coup. Alors comme ça, vous voulez jouer les coriaces, et bien à nous deux ! Je sors mon arme secrète : le pilon et le mortier !!! Et petit à petit, j’arrive à réduire tout cela en une pâte assez compacte.
Je la réserve pour le moment et je mélange dans ma bassine à confiture le même poids que la purée en sucre et 8 cl d’eau. Je fais cuire ce sirop à feu doux pendant ¼ d’heure puis j’ajoute le contenu d’une gousse de vanille bourbon que j’ai raclée avec la pointe d’un couteau. J’ajoute également ma pâte que je délaye bien à l’aide d’un fouet. Et je laisse l'eau s’évaporer jusqu’à ce que la crème de marrons soit compacte à souhait en remuant bien régulièrement. Cette opération doit se faire à feu moyen au risque sinon de se brûler avec les éclaboussures des bloup-bloups... Attention tout de même de ne pas la faire trop épaisse autrement, vous ne pourrez pas remplir correctement les pots.
Au final, verdict de ma compagne : « Hummm, elle est trop bonne ! Meilleure que celle du commerce car elle a en plus des petits morceaux !!! C’est super que tu l’ai réussie ! On va aller en ramasser d’autres !!! »
Arfff ! Ça m’apprendra à faire des préparations longues à réaliser mais très bonnes…